⚠️Recevabilité de la tierce-opposition formée par des riverains.
⚠️Date de la fin de suspension du délai de validité du permis de construire en cas de recours.
En 2016 le Maire de Marseille a délivré un permis de construire à une société en vue de la construction de logements sociaux.
Après le rejet d’un premier recours, plusieurs riverains ont demandé en 2021 la constatation de la caducité du permis, demande qui leur a été refusée par le Maire.
Les voisins ont contesté cette décision de refus devant le Tribunal Administratif de Marseille.
Le maire a finalement accepté de constater la caducité du PC, de sorte que le titulaire du permis a contesté cette décision.
Les deux affaires ont été jointes : le TA de Marseille, en 2023, a rejeté le recours des riverains et annulé le constat de caducité à la demande du titulaire.
Les voisins, qui n’étaient pas partie à la procédure contre la décision de caducité, ont formé une tierce-opposition devant le TA de Marseille, lequel l’a jugée irrecevable en 2024, décision contre laquelle ils se sont pourvus en cassation.
Le CE commence par aborder la question de sa compétence et précise que les dispositions de l’article R.811-1-1 du CJA, qui prévoient que, en zone tendue, les Tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort sur les recours intentés contre certaines autorisations d’urbanisme, s’étendent également aux « recours dirigés contre les décisions constatant leur péremption ou refusant de la constater »
Les voies de recours ouvertes contre la décision prise sur un recours en tierce-opposition à une décision juridictionnelle étant les mêmes que celles prévues contre cette décision, le CE s’estime compétent en l’espèce.
⚠️ Le CE, – constatant la confusion opérée par le tribunal administratif de Marseille qui a déclaré irrecevable la tierce-opposition formée par les requérants en estimant par erreur que leur recours portait sur la décision de refus de constat de caducité, procédure dans laquelle ils étaient partis à l’instance – annule en conséquence la décision de 1ere instance. Il décide de régler l’affaire au fond sans renvoi.
▶️ Le CE analyse d’abord la recevabilité de la tierce opposition des riverains, en application de l’article R.831-1 CJA.
Après avoir rappelé que la simple qualité de voisin ne confère pas qualité pour former tierce opposition contre un jugement annulant la décision constatant la caducité d’un PC, la haute juridiction précise que le fait que le constat annulé ait été prononcé à la demande des requérants rend recevable leur tierce-opposition en l’espèce.
▶️ Le Conseil d’Etat aborde ensuite la question du bien-fondé de la tierce-opposition, et, partant, celle de la caducité du permis de construire, point qui constitue le principal apport de cet arrêt.
En application de l’article R.424-17 du Code de l’urbanisme, la péremption d’une autorisation d’urbanisme intervient en l’absence de travaux entrepris dans un délai de 3 ans suivant la décision accordant l’autorisation, mais également si, passé ce délai, les travaux s’interrompent pendant plus d’1 an. Ce délai de validité peut être prorogé pour 1 an, au maximum à deux reprises, à la demande du bénéficiaire (art. R.424-24 CU).
Aux termes de l’article R.424-19 du Code de l’urbanisme, le délai de validité d’une autorisation d’urbanisme est suspendu en cas de recours contentieux jusqu’au prononcé d’une décision juridictionnelle irrévocable.
C’est sur la question de la fin de la suspension du délai de validité du permis de construire dans une telle situation que le Conseil d’Etat apporte une précision en affirmant que celle-ci survient, non pas à la date de la décision juridictionnelle mais à la date d’expiration des délais de recours ouverts (appel ou cassation) contre la décision de justice en cause, soit deux mois après le prononcé de la décision.
En l’espèce, le Conseil d’Etat constate que le délai du permis de construire litigieux a été, suspendu en raison des procédures intentées par les riverains et prorogé à la demande du bénéficiaire.
Considérant l’ampleur des travaux entrepris à la date de l’expiration de la validité du PC, Il en déduit que le Maire n’avait pu régulièrement en constater la caducité à la date de la décision annulée.
Par conséquent, il confirme la décision d’annulation du TA de Marseille et rejette la tierce-opposition formée par les requérants.