Urbanisme et environnement
Appréciation de l’intérêt à agir dans le cadre d’un contentieux d’une autorisation d’urbanisme
CE, 21 septembre 2022, Société Maison Camp David, n°461113
Dans un arrêt n°46113 rendu le 21 septembre 2022, le Conseil d’Etat affirme qu’en matière de contestation de l’autorisation d’urbanisme, l’intérêt à agir du requérant contre un permis de construire s’apprécie uniquement à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire et sans qu’il y ait lieu de tenir compte des circonstances postérieures.
En l’espèce, la collectivité de Saint-Barthélemy avait délivré un permis de construire à une société autorisant la construction d’un nouveau restaurant de plage en bord de route.
Une société tierce et propriétaire d’une villa située à cinquante mètres de ce futur restaurant en bord de route a alors demandé au juge des référés du tribunal administratif de Saint-Barthélemy la suspension de l’exécution de cette délibération, que le juge a rejeté par une ordonnance du 20 janvier 2022 au motif notamment que la société requérante n’avait pas intérêt à agir selon l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, en ce que plusieurs parcelles déjà construites et densément bâties séparaient la nouvelle construction du restaurant de la propriété de la société requérante et que la route qui desservait la propriété de cette dernière n’était pas affectée par la nouvelle construction contrairement à ce qu’elle alléguait.
Saisi en cassation, le Conseil d’Etat vient ici illustrer la portée de l’article L. 600-1-3 du code de l’urbanisme, crée par l’article 1er de l’ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013.
Celui-ci dispose que, sauf conditions particulières, l’intérêt à agir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager s’apprécie à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire, sans qu’il y ait lieu de tenir compte de circonstances postérieures.
Il en résulte qu’à ladite date, les parcelles séparant la propriété de la société requérante et la nouvelle construction litigieuse n’étaient pas construites puisque la demande de permis correspondante était encore en cours d’instruction. Il en résulte que le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Barthélemy a entaché son arrêt d’une erreur de droit.
Une fois de plus, le Conseil d’Etat donne une illustration de la subjectivisation du contentieux administratif, à travers l’exemple de l’appréciation de l’intérêt à agir en contestation de l’autorisation d’urbanisme.
Le droit à un environnement sain, une liberté fondamentale invocable en référé-liberté
– CE, 20 septembre 2022, n° 451129
Dans une ordonnance n° 451129 en date du 20 septembre 2022, le Conseil d’État (CE) a jugé que « le droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, tel que proclamé par l’article premier de la Charte de l’environnement, présente le caractère d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative », ouvrant donc la voie à son invocabilité en référé-liberté.
Il s’agit là d’une évolution majeure pour ce droit de nouvelle génération. Constitutionnalisé en 2006, accueilli par le Conseil d’État en 2008 (CE, 3 octobre 2008, n° 297931, Commune d’Annecy), la question de son invocabilité dans le cadre du référé-liberté était jusqu’alors restée en suspens, et ce malgré des tentatives prétoriennes isolées (TA Châlons-en-Champagne, 29 avril 2005, n° 0500828, 05008829 et 0500830) et législatives avortées (Mission flash sur le référé spécial environnemental dans le cadre de la Loi Climat et Résilience, 2021).
Projet de décret relatif aux modalités d’octroi de l’autorisation d’exploitation commerciale pour les projets engendrant une artificialisation des sols
– Consultation publique terminée le 16 août, décret à venir.
Dans le prolongement de la loi Climat et résilience, ce décret vient préciser la portée et les dérogations au principe d’interdiction des projets soumis à autorisation d’exploitation commerciale entraînant une artificialisation des sols. A titre d’exemple, l’article 1er du projet de décret prévoit notamment d’insérer un 4° à l’article R. 752-6 du code de commerce prévoyant que pour tout projet engendrant une artificialisation des sols au sens du neuvième alinéa de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, une “justification de l’insertion du projet dans l’urbanisation environnante (…) ainsi que la justification de l’absence d’alternative à la consommation d’espace naturel, agricole ou forestier” devra être présentée.
Précisions sur les conditions de recevabilité d’une tierce-opposition en contentieux des ICPE
– CAA Lyon, 13 juillet 2022, n° 22LY00710
Par une décision du 13 juillet 2022, la cour administrative d’appel (CAA) de Lyon a rejeté comme irrecevable un recours en tierce opposition formé à l’encontre d’une précédente décision de la cour, laquelle annulait le refus du préfet de la Côte d’Or de délivrer une autorisation unique pour la construction et l’exploitation de sept éoliennes et enjoignait l’administration à délivrer ladite autorisation dans un délai de 10 mois.
Ce faisant, le juge administratif lyonnais est venu préciser la jurisprudence du Conseil d’Etat quant aux conditions de recevabilité des tierces oppositions en contentieux des installations classées.
En effet, si, aux termes de l’article R. 832-1 du code justice administrative (CJA), le tiers opposant doit en principe justifier d’une atteinte portée à ses droits par une décision juridictionnelle résultant d’une instance à laquelle ils n’étaient pas représentés, il lui suffit de se prévaloir d’un « intérêt suffisant » à demander l’annulation de l’autorisation dès lors que le juge administratif des installations classées « fait usage de ses pouvoirs de pleine juridiction pour délivrer lui-même l’autorisation » (CE, 29 mai 2015, n°381560).
Or, et comme le souligne la cour administrative d’appel de Lyon, cette exception ne trouve à s’appliquer que lorsque le juge administratif se substitue à l’autorité environnementale dans la distribution de l’autorisation.
La CAA s’étant en l’espèce limitée à prononcer une injonction à prendre une décision dans un sens déterminé au sens de l’article L. 911-1 du CJA, la décision contestée ne délivre pas d’autorisation per se, et les requérants ne sont ainsi pas dispensés de justifier d’un droit lésé.
Contrats publics
Annonces par le Gouvernement de 13 mesures issues des assises du BTP
– 22 septembre 2022
Dans un contexte d’augmentation des prix des matériaux et par souci d’accompagner le secteur dans la transition écologique, le Gouvernement a annoncé les treize premières mesures issues de la concertation organisée avec les partenaires du secteur du BTP.
Entre autres, ont été annoncées la pérennisation du seuil dérogatoire de dispense de publicité et de mise en concurrence (à hauteur de 100 000 euros) pour les marchés publics de travaux, l’abaissement de six à quatre mois du délai inscrit dans le CCAG (cahier des clauses administratives générales) marchés publics entre la notification d’un marché et l’ordre de service de démarrage effectif des travaux afin de diminuer les effets de l’inflation durant cette période, ou encore la prolongation de l’expérimentation du label “Responsable Garant de l’environnement” (RGE) au-delà du 31 décembre 2022.
Modification des prix et théorie de l’imprévision : le Conseil d’État clarifie l’état du droit sans en modifier la substance
– CE, Avis du 15 septembre 2022, n° 405540
Dès les premiers jours de la pandémie de coronavirus, le manque de flexibilité du droit des contrats publics sur l’évolution des clauses financières et le flou autour de la mise en œuvre de la théorie de l’imprévision étaient sources de difficultés pour les différents acteurs de la commande publique.
Aussi, face à l’augmentation généralisée des prix des matériaux et de l’énergie, et en l’absence de jurisprudence récente et pertinente, Bercy a sollicité le Conseil d’Etat (CE) pour éclaircissements. C’est donc peu dire que cet avis était attendu avec impatience.
Dans un premier temps, le CE rappelle que rien, ni dans le code de la commande publique (CCP), ni dans les directives européennes, n’interdit la modification des clauses financières du contrat.
Il procède ensuite à un rappel des différents fondements le permettant : les circonstances imprévisibles les modifications de faible montant et les modifications non substantielles (articles R. 2194-1 et s. et R. 3135 et s. CCP).
Au surplus, le CE note que la conclusion d’un nouveau contrat contenant des prix plus élevés ne s’impose pas à la collectivité (CE, 5 novembre 1982, n° 19413, Sté Propétrol, Rec.).
Dans un second temps, les juges du Palais Royal livrent leur interprétation de la théorie de l’imprévision, née en pleine première guerre mondiale (CE, 30 mars 1916, Compagnie général d’éclairage de Bordeaux, Rec.) et aujourd’hui codifiée au CCP (article 6).
Après avoir rappelé les conditions de l’octroi d’une indemnisation d’imprévision (laquelle doit notamment être provisoire) et la possibilité pour les parties de conclure “une convention d’indemnisation ayant pour seul objet la compensation des charges extracontractuelles subies par le titulaire ou le concessionnaire”, le CE souligne que le bouleversement de l’économie générale du contrat s’apprécie de manière différente selon que l’on soit en marché ou en concession.
Notons que cet avis a été immédiatement suivi d’une fiche explicative de la DAJ de Bercy et, plus récemment, d’une nouvelle circulaire du gouvernement, laquelle vient remplacer celle du 22 mars 2022.
Publication de la nouvelle version du Guide sur les aspects sociaux de la commande publique
– DAJ Bercy, 14 septembre 2022
Quatre après sa dernière mise à jour, l’OECP (observatoire économique de la commande publique de la direction des affaires juridiques de Bercy) a publié la dernière version de son Guide sur les aspects sociaux de la commande publique à la destination de tous les acteurs de la commande publique.
Le Guide est donc dorénavant à jour des derniers grands textes en la matière (Lois AGEC (2020), ASAP et Climat et Résilience (2021)) ainsi que de la dernière mouture du plan national pour les achats durables (2022-2025) et des nouveaux CCAG (2021).
Rapport d’information n°836 fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur la hausse du coût de l’énergie et son impact pour les collectivités territoriales
– Sénat, 27 juillet 2022
Selon l’Association des petites villes de France (APVF), les dépenses énergétiques de certaines communes ont déjà augmenté de 50 % à cause de la crise actuelle.
Ce rapport propose ainsi des solutions permettant aux collectivités territoriales de réaliser des économies rapides, notamment en mutualisant les achats publics et en étendant le bouclier tarifaire aux collectivités, mais aussi, à plus long terme, en finançant la rénovation thermique des bâtiments publics et en développant les énergies renouvelables.